Prises de paroles

 

« Commencer par s’asseoir »

Lectures : Livre de la Sagesse (Sg 9, 13-18)
Lettre de saint Paul Apôtre à Philémon (Phm 9…17)
Evangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 14, 25-33)

Accueil

« Commencer par s’asseoir » ces mots que nous avons choisi d’écrire sur le lutrin ne sont pas que de circonstance ponctuelle, même si nous sommes en train de rejoindre nos chaises tranquillement !
Ces mots sont mis dans la bouche de Jésus et deux fois répétés par lui dans les deux courtes paraboles incluses dans le milieu de son enseignement .
Nous allons les entendre : Ils ponctuent le rude enseignement de Jésus dont la radicalité a de quoi surprendre, voire heurter .La première lecture n’est pas moins radicale.

Pourtant, nous savons secrètement que la voie ouverte par Jésus, sur la quelle il invite à s’engager quiconque veut être son disciple est bien le sens profond de toute vie de chrétien.

Ne peut-on se demander si la question inquiète de certains sur leur identité chrétienne n’est pas l’écran qui leur cache la réponse donnée par Jésus tout au cours de sa vie ?
.
Mais aussi, qui d’entre nous peut se vanter d’être au bon endroit sur le chemin ?

Nous allons en juger chacun en écoutant les lectures de ce jour.

Alors, « commencer par s’asseoir », conseil amical de prudence que nous offre Jésus et qui nous invite à poser des moments d’arrêt dans le flot rapide et encombré de nos vies .Ainsi maintenant.


Pour le passant ou le priant de la semaine, ce peut être une question ou une invitation….

Votre présence, anciens et nouveaux fidèles, personnes de passage, forme un espace et un temps fraternels pour accueillir, entendre, prier avec les paroles de l’Ecriture qui nous sont données en ce jour .

Marie-Thérèse Joudiou

A la première écoute ce texte de l’Evangile de Luc peut nous apparaître, déroutant, mais plus encore scandaleux et tyrannique !
Et dans les commandements du Seigneur il nous est dit : « Tu honoreras ton Père et ta Mère !… ce texte est d’autant plus surprenant !…

Reprenons le texte de l’Evangile : « De grandes foules faisaient route avec Jésus ! ». Il me semble qu’il s’agisse de faire route avec Jésus, de se mettre à sa suite, d’être en marche avec lui !
Paradoxalement dans les deux paraboles qui nous sont données il s’agit de faire attention, d’être prévoyant ! et pour cela, comme le bâtisseur de tour, comme le Roi qui part en guerre, de commencer par s’asseoir et de réfléchir ! Car dans les deux cas il s’agit « d’aller jusqu’au bout de son projet ».
Oui prendre le temps de s’arrêter, de s’asseoir pour réfléchir, sur nos moyens et sur nos manques pour ensuite être capable d’aller jusqu’au bout !

Nous pouvons reprendre les premiers versets de cet Evangile. Je crois vraiment qu’il s’agit de notre propre vie ! Alors qu’en faisons-nous ?
Si quelqu’un vient à moi sans me préférer à sa propre vie il ne peut pas être mon disciple !
Notre vie, ce qui fait notre vie : notre famille, nos proches, mais aussi notre naissance et notre mort ! Ce qui nous est commun à tous !
Nos limites, nos manques, nos croix quotidiennes, nous les connaissons !
Mais notre mort nous savons seulement qu’elle sera au rendez-vous !
Ainsi, préférer le Christ, signifierai alors pour nous, de faire route avec lui ! D’aller jusqu’au bout, d’être capable d’affronter notre mort à son exemple et d’entrer dans la vie nouvelle qui nous est donnée !

 

« Sans me préférer… »
De quelle nature est cette préférence ?

A première lecture, ces mots ne peuvent-ils pas être entendus comme irrecevables, excessifs, tyranniques ?
Nous serions, alors, écrasés : « ce n’est pas moi, ils sont impossibles à incarner… » ; ou bien, englués dans nos tiédeurs, nous serions tentés par le « il faut en prendre et en laisser dans l’Evangile ! » ?
Dépourvus, écrasés, comme ces bâtisseurs de tours ou comme ces rois guerriers, partis sans discerner quel était le seul véritable viatique, nous serions tentés d’imaginer l’amour que Dieu nous demande comme une sorte de tour de force, d’exploit surhumain ?

La première conversion qui nous est demandée, à nous chrétiens, c’est celle de notre regard porté sur le Christ et celle de notre écoute.

Et si cette parole était à recevoir comme étant celle de l’excès, de la démesure de l’amour, faisant écho à la voix du Dieu biblique, jaloux et passionnés, qu’avaient pressenti les prophètes ?
Et si nous ne pouvions la recevoir que de celui qui nous a donné sa vie même ?

« Celui qui ne porte pas sa croix pour marcher à ma suite… »
Là encore, nous pourrions y lire une parole écrasante alors que c’est d’un dynamisme dont il s’agit : se lever, lever ce qui nous immobilise et ce qui nous cloue.

Dans mon existence, quelles sont ces croix, visibles ou dissimulées, sur lesquelles je me fixe ou sous lesquelles je me ploie, et que le Christ m’appelle à déraciner, non pour les nier mais pour les lever ?

S’agit-il d’un choix entre l’Amour des autres et l’Amour de Dieu ?
Acceptons-nous un choix qui nous enferme et qui exclut ?
Alors qu’il s’agit tout simplement d’entrer dans cet Amour des autres, seul chemin vers Dieu !

Gérard Wybo